Comme son nom l'indique, Acoustically Driven est un live... acoustique (sans blague) représentant la facette la plus soft du répertoire d'Uriah Heep. Electrically Driven, son pendant électrique, était parfaitement équilibré au niveau de la set list, toutes les époques phares du groupe étaient également réparties et ce live contenait du heavy metal, de l'acoustique, du prog, de l'épique, du rock, bref y'avait de tout pour faire un (Wonder)world. Ce n'est malheureusement pas le cas d'Acoustically Driven.
Pourtant, on aurait pu espérer un putain d'album Unplugged quand on sait à quel point le répertoire d'Uriah Heep est riche et varié. Mais le groupe a préféré nous la jouer tranquille et pépère en reprenant essentiellement des ballades, si bien qu'on a plus souvent l'impression d'écouter un "best of ballads" à la Scorpions qu'autre chose. Quel dommage ! Alors il nous reste plus qu'à imaginer dans nos rêves ce qu'aurait pu donner des classiques tels que Look At Yourself ou Easy Livin' en version acoustique. Cela aurait pu être très dynamique et festif.
Voilà pour ce qui est de la déception. La plupart des titres datent de l'époque David Byron, seuls quatre titres sont issus du line-up actuel et des albums récents. On ne peut pas dire qu'Uriah Heep prenne un risque énorme en interprétant Lady In Black, The Easy Road ou Blind Eye puisque ces titres sont déjà acoustiques à la base. Par contre au niveau de la production, de la finesse qui se dégage du jeu des musiciens et la qualité générale du traitement acoustique de chaque morceau, là pas de problème, c'est le top du top !
Bernie Shaw interprète avec une grande justesse les morceaux de l'ère Byron, et même mieux, il se les est complètement appropriés. On est loin du chanteur braillard typé FM lorsqu'il avait débarqué dans Uriah Heep à la fin des années 80. Et le groupe n'a pas lésiné sur les moyens : choristes et section d'instruments à corde (violons, violoncelles), tout ça est utilisé à bon escient, sans que cela puisse paraître excessif.
Quel plaisir en tout cas de voir une bonne quantité de titres inédits en live, qu'Uriah Heep n'avait pas interprété depuis des lustres. Des ballades extirpées des oubliettes comme Why Did You Go, The Easy Road ou Come Back To Me, sans parler de la magnifique réadaptation de Wonderworld avec le violon pour remplacer les claviers (vieillots) de Ken Hensley. Cette version de Wonderworld surpasserait presque l'originale à mon avis.
Au rayon "dark", hormis Wonderworld, il y a aussi le grand retour de Echoes In The Dark (forcément) dans une superbe version là encore. Come Back To Me sonne un peu "soupe" par contre, ce qui était déjà le cas de la version originale remarquez ! Enfin bon, c'est pas du Eric Clapton non plus (Tears In Heaven hihihi, pardon pour les fans... mais y'en a t-il vraiment ici ???!!!), qu'on ne s'y trompe pas !
De même que les deux ballades de l'album Different World sont superbement revisitées, avec une couleur plus intimiste et pas "FM" pour un sou contrairement à leurs versions studio : Cross That Line est véritablement un des moments forts de ce live. D'ailleurs, on se rend compte que les ballades les plus récentes comme Different World sont bien plus dynamiques que les anciennes, notamment au niveau des refrains, et celui de Cross That Line, appuyé par les choeurs et les violons, est tout simplement magique. The Golden Palace, l'unique extrait du dernier album en date (Sonic Origami), est également poignant et même légèrement prog dans sa structure. Bizarrement, aucun titre de l'excellent Sea Of Light, peut-être trop heavy ce disque !!!???
Heureusement, il n'y a pas que des ballades, et tout ce qui n'est pas ballade contribue justement à relancer le rythme, que ce soit les choeurs entraînants de The Shadows And The Wind ou la flûte enchantée de Ian Anderson (Jethro Tull) présent en tant qu'invité. La flûte se marie à merveille avec la guitare acoustique sur Blind Eye et Circus. Le medley final (The Wizard/Paradise/Circle Of Hands) et Traveller In Time achèvent enfin le fan dans un trip nostalgique.
Mais l'auditeur a beau être fan d'Uriah Heep, il est avant tout humain, donc se coltiner dix ballades d'affilée n'était peut-être pas ce qu'il y avait de mieux à proposer. L'inverse est aussi vrai ; que des titres heavy sur un live d'Uriah Heep aurait pu écoeurer (c'est un peu le problème de Live at Shepperton '74). Mais ne faisons pas la fine bouche, Acoustically Driven reste un objet indispensable, mais pour les fans seulement.
Note : 3/5